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Edito du 28 janvier 2024 : Quelques réflexions du Cardinal François-Xavier Bustillo

Quelques réflexions
du Cardinal François-Xavier Bustillo

J’étais un des 135 prêtres ayant suivi, la semaine dernière, la retraite prêchée par le nouveau cardinal, évêque d’Ajaccio. Je vous livre quelques-unes de ses réflexions qui peuvent, je pense, vous intéresser.

La société est complexe. On lance des polémiques à propos de tout. On démolit des personnes puis on passe à d’autres. C’est un processus destructeur. Notre mission de chrétien est d’aller à contrecourant. Pour cela, il nous  faut agir à la manière de l’Évangile. Après un moment de réparation dans l’Eglise, il faut aller au-delà, proposer des solutions constructives et surtout toujours rester dans la bienveillance. 

1.L’innocence
Il faut travailler et retrouver la dimension de l’innocence. C’est à dire retrouver la bonté et la pureté de notre foi. L’innocence n’est pas la naïveté, c’est une attitude puissante. C’est renoncer à la nuisance. C’est une base de notre vie chrétienne. On oublie trop souvent l’innocence originelle, la communion avec Dieu et la Création. La mentalité innocente se laisse guider par le bien, un regard d’espérance, l’émerveillement. Elle met en valeur la bonté, la capacité à changer, à s’améliorer. Le Vendredi Saint le Christ est déformé puis, à Pâques, il est transformé, transfiguré, en passant par le silence du Samedi Saint. L’innocence nous fait vaincre la férocité qui nous habite. C’est un choix face à ceux qui font le mal. Il faut décider de ne pas nuire et agir avec bienveillance. Il ne faut pas perpétuer la vengeance. Jésus vit ce qu’il dit. Il réalise son enseignement dans sa Passion. Au moment le plus injuste, l’Innocent ne se révolte pas. Judas dit « J’ai péché ne livrant à mort un innocent ». Pilate  déclare : « Je suis innocent du sang de cet homme ». Or on ne peut pas se laver les mains. Il faut être cohérent jusqu’au bout. Il faut véhiculer la paix.

2.La pudeur
On ne peut pas tout dire et tout montrer. Il faut développer la pudeur des sentiments et celle du corps. Au nom de la liberté d’expression, les gens se montrent trop, il y a trop de manque de pudeur et de respect. Il faut accompagner pour vivre la liberté. Ne pas cultiver son intimité ouvre la porte à un monde destructeur. Il ne faut pas s’afficher au risque d’être attaqué ou blessé. On met trop en avant le paraître pour ne pas risquer de disparaître par déficit de l’être. Il faut une attitude de retenue dans la vie relationnelle. Par pudeur, on ne doit pas montrer son intimité. La pudeur est différente de la honte. La pudeur engendre la décence c’est à dire la dimension sociale, elle favorise la dignité de l’homme. En effet, l’être humain ne se réduit pas à un corps. Il a une âme, une vie intérieure et extérieure. Dans la société, nous avons besoin de la modestie, d’avoir un regard intériorisé sur l’autre et non émotif. A la différence des animaux, l’homme est un être profond. Seul l’être humain est doué d’intériorité car il a une intelligence et une conscience. Jésus aime. Il véhicule la liberté et n’est ni dans la séduction ni dans la possession. Il ne retient pas. Jésus voit tout mais agit au rythme de l’autre (ex : sa rencontre avec la samaritaine). Un cœur pur est libre, irrigué par l’amour de Dieu. La grandeur d’un cœur pur est d’être unifié. Si on sort de la pureté, on entre alors dans l’hypocrisie.

Chaque personne est un univers en soi. Dans notre société on confond tout : harcèlement, emprise, manipulation. Au lieu de dire ce que nous pensons, nous disons ce que nous ressentons. Aussi l’émotion passe-t-elle avant la raison. L’être de l’autre doit toujours être respecté. Jésus est libre et libère. Il accompagne dans la liberté. Si nous sommes libres, nous pouvons garantir la liberté des autres.

Une dernière réflexion,  l’Eglise a un patrimoine extraordinaire (architecture, musique, sculpture peinture…). Elle a fait rêver. Aujourd’hui encore elle doit faire rêver.